Le calendrier malgache

Un peu d'histoire

Histoire de Madagascar

Prenons rapidement connaissance de l'histoire de Madagascar au travers de nos lunettes «spéciales calendriers» qui vont nous permettre de découvrir les points importants pour ancrer le calendrier malgache dans le temps. Et, bien entendu, penchons-nous particulièrement sur les origines de la population malgache d'après des sources Encyclopédie Universalis.

Brassages séculaires et migrations intérieures ont façonné un peuple authentiquement « afro-asiatique » ainsi que l’atteste, sur un fond réel d’unité culturelle et même linguistique, l’éventail des dix-huit ethnies officiellement recensées, certaines comprenant des sous-groupes et clans particuliers. À partir de la fin du XIXe siècle, la colonisation a favorisé l’implantation durable de minorités étrangères, européenne et notamment française (les Vazaha), chinoise, indo-pakistanaise musulmane (les Karana) et comorienne ; des communautés modestes en nombre d’individus (quelques dizaines de milliers au total), mais économiquement puissantes, voire dominantes....

La question du peuplement de Madagascar fait toujours l’objet de recherches et de débats, mais deux points semblent aujourd’hui attestés : le sous-continent malgache n’a pas trace de préhominien, alors que l’Afrique voisine, australe et orientale, revendique avec de bons arguments paléontologiques le statut de berceau de l’humanité ; par ailleurs, le peuplement originel de la Grande Île, issu de migrations d’Asie et d’Afrique, serait d’origine relativement récente (VIIIe-XIIIe s. apr. J.-C.).

La diversité anthropologique des Malgaches est évidente. Certains types évoquent l’Indonésie, d’autres l’Afrique ; les types mixtes sont les plus fréquents, conséquence de métissages multiples, anciens ou plus récents, entre originaires d’Asie et d’Afrique, eux-mêmes nuancés par d’autres apports asiatiques et européens. Une diversité qui éclate sur un fond incontestable d’unité et qui fait toute l’originalité de la personne et de la personnalité malgaches. Le poète Jacques Rabemananjara la résume ainsi (Présence de Madagascar, 1957) : « Visiteurs malais, asiatiques, africains, européens y ont déposé ensemble ou tour à tour leurs marques et leurs types. De leur brassage séculaire s’est formé un peuple intermédiaire guère facile à déterminer et pourtant typiquement reconnaissable : le Malgache contemporain. « Pour le président Tsiranana, les Malgaches étaient » les seuls véritables Afro-Asiatiques ». Plus sommairement, la distinction traditionnelle entre Merina et Côtiers renvoie aux origines lointaines : Indonésie (ou plutôt Austronésie selon la formule à la mode) pour les premiers et Afrique pour les autres. Il faudra nuancer.

Ce sont des Indonésiens (Austronésiens) qui auraient donc été les premiers arrivants. On a avancé l’idée de navigateurs en pirogues à balancier venus par le sud de l’Asie et de la côte d’Afrique où un premier mélange se serait produit avant d’aborder Madagascar. On a également supposé une arrivée plus tardive d’Indonésiens disposant de plus grands bateaux et qui auraient d’abord lancé des expéditions de pillage, voire de colonisation, sur la côte africaine avant de toucher la Grande Île.

La langue, elle, est d’origine indonésienne (on disait naguère malayo-polynésienne). Cela confère à Madagascar un fond d’unité linguistique très réel malgré les variations dialectales et les apports de vocabulaire africain (bantou) et de termes arabes qui ont progressivement enrichi cette langue dont la transcription écrite ne sera effectuée qu’au XIXe siècle.

Les Européens, quant à eux, n’ont abordé cette contrée, bien après les navigateurs asiatiques et arabes, qu’au début du XVIe siècle. À la suite des Portugais (Ils baptiseront île Saint-Laurent l’île découverte par eux.) et des Hollandais qui laissent peu d’impact viendront les Anglais et les Français dans le cadre de la compétition coloniale pour la maîtrise des îles du sud-ouest de l’océan Indien, notamment les Mascareignes. Les relations de voyage de ces découvreurs ou/et conquérants constituent les premiers éléments écrits d’une histoire de Madagascar à partir, naturellement, d’un point de vue européen (ou européocentriste comme on dit aujourd’hui) et sur la base d’observations et d’informations orales limitées.

Depuis une vingtaine d’années, la revue Omaly sy Anio (hier et aujourd’hui), publiée par le département d’histoire de l’université de Tananarive, maintient avec brio, dans des conditions matérielles et universitaires devenues très difficiles, un travail d’analyse et de critique historique sans lequel un pays n’a pas d’histoire.

Madagascar a précisément une histoire riche et mouvementée en ce qui concerne l’époque moderne et contemporaine. Dès 1820, la Grande Île, qui doit son début d’unité politique au règne du roi Andrianampoinimerina (1787-1810), se présente en État internationalement reconnu, alors qu’en Afrique voisine la plupart des pays ne sont, du point de vue européen, que des « territoires sans maître » (res nullius). Andrianampoinimerina rétablit l’unité politique merina : après de longues guerres, il réussit, lui qui avait usurpé l’un des royaumes, à s’emparer des trois autres. Il transfère sa capitale d’Ambohimanga, restée colline sacrée, à Antananarivo située sur une colline distante de trente kilomètres.

Au XVIIe siècle, le pays – qui a pris le nom d’Imerina (« pays qu’on voit de loin sous le jour ») et ses habitants celui de Merina – se développe sur tous les plans, économique, démographique et politique. Rendue célèbre par ses reines successives, la monarchie merina, qui s’est ouverte au monde occidental et au christianisme (malgré la résistance de la reine Ranavalona Ire 1828-1861), cède finalement à la conquête coloniale française en 1896 : colonie sous la IIIe République, puis territoire d’outre-mer (T.O.M.) sous la IVe République, Madagascar devient État autonome dans le cadre de la Communauté créée par la Ve République française en 1958, et obtient finalement l’indépendance en 1960.

En quelque trente années, trois régimes politiques vont se succéder. C’est d’abord la Ire République malgache dirigée jusqu’en 1972 par le président Philibert Tsiranana qui ne cache pas sa fidélité aux démocraties occidentales. À la suite d’ une crise de régime, qui se poursuit dans la confusion jusqu’à la fin de l’année 1975, surgit une deuxième république qui se réclame, elle, de l’idéologie socialiste révolutionnaire. Animée par le président Didier Ratsiraka, cette République démocratique de Madagascar (R.D.M.) s’enlise progressivement dans le désordre économique et politique. Après bien des péripéties, Madagascar revient, en 1992, à un régime pluraliste et modéré dans le cadre d’une toute nouvelle IIIe République actuellement en cours d’installation. L’année 1993 ouvre donc une période politique inédite à Madagascar après une transition démocratique agitée. Les incertitudes ne sont pas levées pour autant puisqu’il s’agit en définitive de construire un nouveau contrat social dans une société qui, depuis 1972, a été profondément perturbée... source Encyclopédie Universalis.

Et, pour terminer, découvrons la carte géographique de Madagascar et celle des ethnies dont la multiplicité va jouer un grand rôle dans les calendriers malgaches.

Carte générale de Madagascar
Carte générale de Madagascar Encarta © Microsoft
Limites des ethnies
Limites des ethnies ethnology.gasy.org

Quelques données générales

Le calendrier

En guise d'introduction

J'avoue que jamais, depuis que je me penche sur les calendriers, je n'ai éprouvé autant de difficultés à obtenir des renseignements sur un calendrier traditionnel. La plupart des réponses, quand il y en avait, à mes questions à des personnes dont je pensais qu'elles avaient quelques éléments de réponse étaient trop vagues et les textes sont très rares.

Alors, si un Malgache qui lit ces lignes peut, directement ou en questionnant des «anciens», apporter sa contribution à notre «enquête» qu'il ne se gêne pas ! Ce serait sympa de sa part.

Les calendriers

Compte tenu de ce qui précède, et si vous le permettez, nous n'allons pas aborder la découverte de ce qu'on peut entrevoir du calendrier malgache comme nous le faisons habituellement, mais un peu comme une enquête. Nous allons partir d'écrits (peu nombreux) et voir en fonction de ce que nous savons des autres calendriers ce qu'on peut raisonnablement en conclure.

Autant le dire tout de suite, il manque certaines pierres à l'édifice et quiconque nous aidera à le consolider sera le bienvenu. N'hésitez donc pas à me passer un message si vous pensez avoir le moindre élément qui puisse conforter des conclusions, les démentir ou les compléter.

On y va ?

Notre enquête va commencer avec trois textes parus dans des journaux malgaches ou sur Internet.

Alahamady : le Nouvel An malgache se fêtera la semaine prochaine

Source Midi Madagasikara
vendredi 21 novembre 2003, par TIM France

Cette année, le Nouvel An malgache tombe le 24 novembre, c'est-à-dire en début de la semaine prochaine. À l'instar des Chinois, les Malgaches «anciens» ont fêté la nouvelle année un autre jour que le premier janvier suivant le calendrier grégorien. En effet, chez nous, la notion de l'espace-temps est liée à la notion de destin, et c'est cette considération qui régit son univers socioculturel.

La vie quotidienne du Malgache se base ainsi sur les astres et son rapport avec la lune. Caractérisé par le Bain Royal et le culte des Ancêtres, depuis le règne de Ralambo (1575-1610), à travers tous les lieux sacrés du centre du pays, le Alahamady est synonyme d'ablution et de purification. En cette période, amis et ennemis se serrent la main, fraternité et convivialité sont les maîtres mots, différends et autres rancunes sont jetés aux oubliettes…

En général, l'année qui dure 354 jours se subdivise en 12 mois lunaires de 28 jours, et la semaine malgache commence le jeudi et se termine le mercredi. Par exemple, le premier mois Alahamady de l'année 2003 a commencé le 4 décembre et s'est terminé le premier janvier. Pour l'année 2004 à venir, il durera du 24 novembre au 22 décembre… Trois jours durant, danses, musiques, hiragasy, divers jeux, de la viande de zébu à profusion, lampions, kabary animeront les quelques communautés qui le célèbrent encore. L'Alahamady, n'est certes plus célébré avec le faste d'antan, mais l'on continue à le fêter à travers l'île, notamment en Imerina et dans la région Antemoro...

Wanadoo Madagascar

Deux nouvelles lunes pour l’Alahamady, le Nouvel An malgache
16-03-2004 / 00:48

Le premier jour de l'année malgache 2004 ou Alahamadibe, correspond au 21 mars du calendrier grégorien. L'éphéméride malgache est conçue suivant le mouvement astral et cette fois, la nouvelle année est assez particulière, d'après les explications de Henri Randrianjatovo, directeur de la Maison de la Culture Malgache et de David Rakoto, membre de l'association Jaky Mena.

En effet, la lune et le soleil se rejoindront ce jour-là, vers 1h45 au groupe du zodiac Alahamady, qui correspond au signe du bélier. Ce phénomène ne s'était produit qu'une fois, en 1909 et ne se reproduira pour la troisième fois, qu'en 2023. Par ailleurs, cette année sera marquée par deux nouvelles lunes d'Alahamady, le 21 mars et le 29 avril prochains. Ce qui est signe de gloire, devaient traduire ces deux intervenants lors d'une conférence organisée avec Radio Feon'Imerina, à la Tranompokonolona Analakely, samedi dernier.

En outre, l'Alahamadibe est un grand événement dans la tradition malgache. Il marque la fin de la période pluvieuse ou Fararano et le début de la moisson. C'est en quelque sorte la fin de la misère. L'Alahamadibe coïncide également avec la célébration de l'anniversaire de trois souverains malgaches que sont Ralambo, Andriamasinavalona et Andrianampoinimerina. Pour ces différentes raisons, la nouvelle année malgache, est célébrée dans la joie et dans l'allégresse, comme il se doit, à chaque début d'année.

V. A.

© Midi-Madagasikara

Nouvel An malgache

En date du 15/03/2004 :

Le nouvel an malgache traditionnel viendra le 21 mars 2004 à 1h 42mn du matin. C’est à cet instant que le soleil et la lune entreront ensemble et en même temps dans le signe zodiacal de l’Alahamady ou du Belier. Cette conclusion émane de l’association Jaky Mena (regroupant les descendants des derniers régnants à savoir, les Zanakandriana, Zazamarolahy et Andriamasinavalona), du Trano Koltoraly Malagasy et la radio Feon’Imerina.

Samedi dernier, une communication publique portant sur ce nouvel an malgache a été organisée par ces trois entités, au Tranompokolona Analakely. Il s’agit d’une sensibilisation à la mémorisation et à la célébration de cette date légendaire.

D’après les explications, ce fait très rare ne s’est produit et ne se produira en tout que 4 fois en 150 ans (de 1890 à 2050) en : 1909, 1928, 2004 et 2023. En effet, tous les ans, si le soleil entre toujours dans le signe Alahamady le 21 mars, la lune, quant à elle, n’y entre que plus tard et leur alignement face à la terre sera l’éclipse totale du soleil, appelée encore nouvelle lune de l’Alahamady ou Tsinan’Alahamady, qui est le nouvel an malgache (le 1erjour du 1ermois). Le soleil entrera cette année dans le signe Alahamady (à l’angle 0°) ainsi que la lune. Leur alignement se fera en même temps le 21 mars. Selon les connaisseurs en astronomie, il y aura deux Tsinan’Alahamady cette année. En effet, le soleil et la lune s’aligneront une nouvelle fois dans le signe zodiacal de l’Alahamady le 19 avril 2004 à 16h 22mn. Ce sont des faits scientifiques qui n’ont rien à voir avec la foi ou toute idée de culte.

Le premier mois hébreux appelé Nissan ou Abib est exactement similaire au 1ermois malgache, à la différence qu’ils fêtent la pleine lune du mois à Pâques ; les chrétiens, quant à eux, fêtent Pâques le premier dimanche après la pleine lune du mois hébreux.

Les intervenants ont noté que, quant on a rien à soi, on emprunte volontiers celui des autres. La nature a horreur du vide, et tout peuple sans repère est un peule sans avenir.

Mbolatiana R

À une première lecture, ces textes suscitent au moins deux réactions :

Analyse du premier texte : un calendrier lunaire

Relevons tout d'abord deux bribes de phrases : ...chez nous, la notion de l'espace-temps est liée à la notion de destin... La vie quotidienne du Malgache se base ainsi sur les astres et son rapport avec la lune.

Ce rapport avec la Lune nous fait tout naturellement penser à un calendrier lunaire. Le reste du texte va nous le confirmer :

En général, l'année qui dure 354 jours se subdivise en 12 mois lunaires de 28 jours, et la semaine malgache commence le jeudi et se termine le mercredi. Par exemple, le premier mois Alahamady de l'année 2003 a commencé le 4 décembre et s'est terminé le premier janvier. Pour l'année 2004 à venir, il durera du 24 novembre au 22 décembre*.*

À nos calculatrices !! 12 X 28 = 336. 12 mois lunaires de 28 jours ne font donc pas 354 jours. Où sont les jours manquants ? Essayons autrement. Entre le 04/12/2003 et le 02/01/2004, il se sera écoulé... 30 jours. Ah!!

Exploitons deux autres pistes, l'une astronomique, l'autre astrologique.

Contrairement au calendrier occidental, la durée d'un mois malgache (qui correspond à la lunaison) est variable

Cette lunaison peut durer entre 26 à 30 jours. Il faut compter 28 jours pour Adaoro, Adizaoza, Alahasaty, Asombola, Alakarabo, Alakaosy, Adalo, Alohotsy alors qu'il faut attendre jusqu'à 31 jours avant que la nouvelle lune n'apparaisse en Alahamady, Asorotany, Adimizana, et Adijady.

Le 28èmejour est celui de la conjoncture et il faut compter 1 jour entre celui ci et l'apparition de la nouvelle lune voire 2 pour Alahamady, Asorotany, Adimizana et Adijady. Ces jours supplémentaires sont appelés - en astrologie - les « jours qui reviennent « et on en » tue » 1 -ou 2 jours- selon les mois..

Le mois malgache dépend beaucoup de la lunaison et un astrologue, digne de ce nom, doit impérativement en tenir compte.

Les mois sont donc représentés comme suit : Alahamady, Asorotany, Adimizana et Adijady correspondent aux 4 grandes divisions astrologiques lunaires, soit les 4 angles d'une case. Ils possèdent chacun 3 destins : le « vava « le » vontony « et le « vodiny » alors que les autres mois - placés sur les côtés latéraux (2 sur chaque côté) - ne comprennent chacun que 2 destins (vava et vodiny).

Le calcul se fait donc comme suit.
En 1964, l’Alahamady a commencé le 13 février 1864 à 16h02 . Mais comme on a dépassé le moment où le soleil est perpendiculaire au faitage de la maison (c’est à dire au zénith donc midi), le décompte doit donc se faire à partir du lendemain, c’est à dire le 14.

14 – 1 vava alahamady 18 - 5 vody adaoro
15 – 2 vt " 19 – 6 vv adizaoza
16 – 3 vd " 20 – 7 vd
17 – 4 vv adaoro 22 – 8 vv asorotany :
Et ainsi de suite jusqu’à votre date de naissance…

La lunaison dure donc 29 jours sauf pour les destins mère où il faut compter 30 voire 31 jours avant que la nouvelle lune n'apparaisse. D’où une année de 352 jours. Elle est donc différente du calendrier européen qui, basé sur sur le cycle solaire, dure par contre 365 jours (ce mode de calcul a été adopté par les Antalaotra)

Bingo !! Si ce texte contient quelques énormités du point du vue astronomique (par exemple, un mois lunaire ne peut pas être d'une durée inférieure à 28 jours), il nous en apprend beaucoup sur ce calendrier que nous devons bien considérer comme étant un calendrier lunaire.

Résumons nos acquis : l'expérience des calendriers nous permet de dire que les astrologues n'ont jamais inventé le moindre calendrier. Ils s'appuient donc sur ce qui existe. En l'occurrence, c'est sur un calendrier lunaire. Du strict point de vue astrologique, tout jour d'un mois lunaire qui dépasse le 28 est «tué» et a la même signification que le 28ejour.

L'année compte 354 ou 355 jours (et non pas 352 comme dit le texte) et commence le premier jour du premier mois (qui porte le nom de Alahamady).

Le premier jour du mois est le jour de la nouvelle lune si celle-çi se produit avant 12h. Sinon, le premier jour du mois est le lendemain.

Les noms des mois sont : Alahamady, Asorotany, Adimizana, Adijady, Adaoro, Adizaoza, Alahasaty, Asombola, Alakarabo, Alakaosy, Adalo, Alohotsy. À part le premier - Alahamady - nous ne savons encore rien de leur ordre.

Mais, au fait, pourquoi avoir exploité cette piste astrologique ?

Tout simplement à cause de la mention d'une notion de destin dans le premier texte ; Et on retrouve cette mention dans le texte de notre astrologue. Avec même des précisions puisque nous apprenons que les mois «possèdent» des destins (Vintana). 3 destins pour 4 mois et 2 pour les autres. On en arrive donc à (3 X 4) + (8 X 2) = 28 destins. Tiens donc. Bien que l'astrologie ne soit pas le sujet de cette page ni de ce site on ne peut s'empêcher de faire le rapprochement avec les 28 maisons de l'astrologie arabe.

On ne peut pas non plus ne pas noter à quel point cette notion de destin est importante dans la vie du peuple Malgache. Ces destins, sous influence lunaire, vont fixer la personnalité de chacun, sa vie quotidienne et sa... destinée. 28 destins pour l'année, mais aussi pour le mois (d'où le mois astrologique de 28 jours) et le jour vont marquer la voie quotidienne de tout individu.

Même la construction des maisons traditionnelles malgaches est sous influence de ces 28 destins. Aux différentes positions de la Lune au cours de l'année sont associés les points cardinaux et les murs et angles de la maison (orientée Nord-Sud) sont une représentation en miniature de l'année lunaire.

Quelle est l'origine du nom des mois ?

Comme on pouvait s'en douter les noms des mois tels que nous les avons découverts sont d'origine Arabe. En fait, c'est la «malgachisation» des noms arabes des signes du zodiaque. Découvrons-en la liste dans l'ordre des mois.

Malgache Arabe Signe Equiv. Grégorien
Alahamady Al-h' amal Bélier mars-avril
Adaoro Ath-thaûr Taureau avril-mai
Adizaozo Al-dzaûza Gémeaux mai-juin
Asorotany As-sarat ân Cancer juin-juillet
Alahasaty Al-asad Lion juillet-août
Asombola As-sumbula Vierge août-septembre
Adimizana Al-mizan Balance septembre-octobre
Alakarabo Al-aqrab Scorpion octobre-novembre
Alakaosy Al-qaûs Sagittaire novembre-décembre
Adijady Al-djadi Capricorne décembre-janvier
Adalo Ad-dalû Verseau janvier-février
Alohotsy Al-h'ût Poissons février-mars

Pour être précis, notons que dans une étude datant de 1911, E.F. Gautier précise que, dans un premier temps, ces mots arabes correspondaient à des destins distribués trois par trois entre les quatre saisons et que ce n'est que plus tard que les mois prirent les noms de ces destins.

Où fut pratiqué ce calendrier lunaire ?

Selon E.F. Gautier "Dans le Madagascar actuel, au XIXe et XXe siècle, l'Imérina, sur qui l'attention est restée longtemps concentrée, est la seule province peut-être qui ait eu un calendrier entièrement lunaire ; elle le doit apparemment aux musulmans comoriens, avec qui elle a été en relations faciles et suivies."

Avant d'en terminer avec ce calendrier lunaire, posons-nous quelques questions :

Analyse des deux derniers textes : un calendrier luni-solaire

Quels sont les éléments communs à ces textes ?
Quelles sont les différences entre les deux textes ?
Le «ménage» étant fait, que peut-on déduire de ce texte ?

Une chose capitale. Le début de l'année se produirait lors de la nouvelle lune de la période où le Soleil entre ou vient d'entrer dans le signe du Bélier. Nous avons donc affaire à un calendrier luni-solaire puisque le nombre de mois (lunaires) va dépendre de la position du Soleil. 12 ou 13 mois selon les années.

Il nous reste quand même à le vérifier et à régler un sérieux problème. Commençons par le problème.

Comment peut-on, pratiquement, savoir que le Soleil entre dans le signe du Bélier ? Nous avons vu que le zodiaque auquel nous avons affaire est un zodiaque tropical et non sidéral. Ce qui veut dire que l'observation du ciel ne nous sera d'aucune utilité puisque le Soleil, lui, à cette période qui nous intéresse, sera quelque part dans les Poissons.

Bien sûr, il suffirait de dire qu'in va attendre la nouvelle lune à partir du 21 mars. Mais ce serait quand même assez cocasse de vouloir construire un calendrier ancien... à partir d'un calendrier moderne.

Alors, que faire ? Attendre la nouvelle lune du jour ou après l'équinoxe d'automne (nous sommes dans l'hémisphère Sud) ? Enchaîner les mois, en vérifiant s'il faut en rajouter un à l'année, à partir du tout premier mois de la toute première année à laquelle le Soleil entrait vraiment dans le signe du Bélier ? La question reste entière et le texte, lui, se contente de moderniser un calendrier ancien sans trop se poser le problème du pourquoi.

Selon E.F. Gautier, une étude aurait été menée par le R. P. Thomas et publiée par le Bulletin de l'Académie malgache. Le P. Thomas aurait fait deux découvertes capitales.

La première est qu'avant de porter des noms arabes, les mois portaient des noms empruntés au sanscrit. Ces noms de mois, ont été, "suivant toute vraisemblance, d'un usage général dans l'île entière". Ce n'est qu'à partir du XVIIe siècle que ces noms ont peu à peu disparu pour laisser place à ceux que nous connaissons.

La deuxième découverte est que le calendrier est bien luni-solaire. Selon un certain Flacourt, dans un ouvrage titré Histoire de la grande île de Madagascar datant de 1661 et que j'ai retrouvé, "le premier mois commence à la nouvelle lune de mars". Certes, il ne dit pas expressément que le calendrier est luni-solaire, mais il est permis de penser que cela va de soi pour un Français habitué aux calendriers solaires. Et comme Gautier le fait justement remarquer, quand Flacourt parle du Ramadan, il n'oublie pas d'observer que "ce jeune n'a point de mois réglé et se fait tantôt en un mois, tantôt en un autre". Et Gautier de conclure fort justement que dans un calendrier lunaire, le jeune aurait invariablement été célébré le même mois.

Et puisqu'on parle de ramadan, revenons à une question à laquelle nous avons maintenant certainement une réponse : pourquoi ce sont les noms des signes zodiacaux arabes qui ont été utilisés pour nommer les mois et non pas tout simplement les noms des mois arabes ?

Tout simplement parce que, comme l'écrit Gautier "Les mois sont des divisions de l'année lunaire, les signes du zodiaque de l'année solaire. Seules ces dernière étaient utilisables par des Malgaches parce que leurs mois lunaires devaient se raccorder tant bien que mal avec une année solaire".

E.F. Gautier a dressé une table de concordance des mois dans les différents noms qu'ils ont portés et qu'il est utile de reproduire telle quelle pour avoir toutes les cartes en main.

Première nomenclature (empruntée à l'arabe ; signes du zodiaque) Deuxième nomenclature (empruntée au sanscrit) Mois français (correspondants en pays Antaimoro et en 1904)
Alahotsy (Pisces) Asaramasay Mars
Alahamady (Ariès) Asarabe Avril
Adaoro (Taurus) Vatravatra Mai
Adizaozy (Gemini) Asotry Juin
Asorotany (Cancer) Hatsiha juillet
Alahasaty (Leo) Volasira Août
Asombola (Virgo) Fosa Septembre
Adimizana (Libra) Maka Octobre
Alakarobo (Scorpius) Hiahia Novembre
Alakaoza (Sagittarius) Fisakamasay Décembre
Adijady (Capricornus) Fisakavy Janvier
Adalo (Aquarius) Volombita Février

La question que nous ne devons pas manquer de nous poser est double :

Nous trouvons la réponse sous la plume du P. Thomas : "A Maravoay, d'après les renseignements recueillis par M. Mathieu, la fête des tombeaux des rois sakalaves se faisait toujours dans le mois de Volambita... et correspondait à notre mois de juin. M. le commandant Leblanc signale que le premier mois de l'année est Volambita, qui tombe toujours en août, chez les Antandroy... Vers le mois de novembre, au début de la saison des pluies, dans la région d'Amborombe, la première lune est Vatravatra. Dans l'Anosy la première lune est en mars."

Bref, si nous avons encore là la preuve que l'année est bien luni-solaire, on peut dire que le début de l'année dépend beaucoup des régions et/ou des ethnies.

Nous allons terminer notre enquête (bien provisoirement parce que nombre de questions n'ont pas de réponse) par une dernière interrogation : Puisque l'année est en partie solaire, comment se fait l'intercalation d'un 13emois ?

Deux réponses qui se rejoignent peut-être dans la vie courante :

La première est agricole et nous citons encore le P. Thomas : "un des mois antaimoro (Alahamaly dans la nomenclature arabe) règle la concordance de l'année avec les saisons ; car ce mois doit toujours correspondre avec le commencement de la saison sèche et la fin des pluies. Et si les Antaimoro constatent... que la saison des pluies persiste dans toute son intensité à la fin du mois d'Alahamaly, ils redoublent ce dernier mois... D'autre part un autre mois peut être aussi bien redoublé. C'est ainsi que l'année courante (1904) aura 13 mois. Le mois d'Alakarabo aura en fait soixante jours, parce que sur le point de prendre fin, il n'aurait pas coïncidé avec la maturité des letchis, s'il avait une durée normale".

La seconde est scientifique et due à Jean-Paul Parisot et Françoise Suagher dans leur livre Calendriers et chronologie (2002) : "... Ils (les Malgaches) surveillent Antarès et l'étoile bêta du Scorpion. Les observations se font à partir du mois de mars jusqu'en juillet face au sud. Si la pleine lune est proche de l'étoile bêta et si la nouvelle lune précédente a lieu dans le Bélier, l'année doit posséder 13 mois".

Mois de 60 jours ? 2 mois de 30 jours ? Nom du mois complémentaire ? Doit-on appliquer la règle de «midi» au calendrier luni-solaire comme au calendrier lunaire ? Comment est vraiment déterminé le début de l'année ? Autant de questions sans réponse.

Noms des jours et chronologie

Les noms des jours sont arabes.

Jour Nom
Dimanche Alahady
Lundi Alatsinainy
Mardi Talata
Mercredi Alarobia
Jeudi Alakamisy
vendredi Zoma
Samedi Sabotsy

Selon Flacourt "les années se comptent par les jours de la semaine, soit l'année du dimanche, celle du lundi et ainsi en continuant".

Les Antaimoro ont donc créé des semaines d'années, un peu comme les Romains avaient créé les Olympiades (4 ans) ou les Lustres (5 ans) .

Et, comme pour les Lustres ou les Olympiades, nous manquons de ce fait de chronologie linéaire et ininterrompue. Soit par manque d'existence de semaine de semaines d'années, soit par manque de comput à partir d'une date fixe.

En guise de conclusion

Faute d'interlocuteurs très bien renseignés sur l'histoire de Madagascar, il nous faut bien reconnaître que beaucoup de questions restent encore en suspens à propos du (ou des) calendrier malgache. C'est peut-être ce qui les rend encore mystérieux et donne l'envie d'en savoir encore plus.

Et puis, cela prouve bien qu'il est quelquefois plus facile de« faire parler» les Mayas ou les Mésopotamiens que ses propres contemporains.

Dernière nouvelle (13/07/2004)

Je viens de découvrir ce texte sur le site de La Gazette de la Grande Ile :

01/04/2004

C’est pour quand exactement ?

Depuis quelque temps, le Nouvel An malgache a fait l’objet de plusieurs discussions. De leur côté, l’association Jaky Mena, après une étude approfondie, a démontré que le Nouvel An malgache était le 21 mars dernier. Il était d’ailleurs formel. De son côté, Norbert Rakotomalala, un «Zanadranavalona» et également concepteur de calendrier agricole, a noté que le 21 mars n’est que le début du signe zodiacal Bélier qui ne signifie pas du tout « Alahamady ». Le mois de mars était l’Alahasaty, contrairement aux études de Jaky Mena qui annonçait que c’est l’Alahamady. Le mois Alahasaty s’achèvera le 19 avril 2004, et la nouvelle lune apparaît à 16h 22mn. À son avis, le nouvel an malgache devra être célébré le 12 novembre 2004. C’est le prochain « Tsinan’Alahamady ». En 2003, c’était le 24 novembre dit-il. Norbert Rakotomalala pense que «Bélier» n’est nullement l’équivalent de l’Alahamady dans l’astrologie malgache. De plus, il n’est pas dans l’habitude des Malgaches de fêter le « Tsinan’Alahamady ». C’était la fête nationale malgache avant la colonisation, on l’appelait « Fandroana ». D’après les traditions orales, le 1er Fandroana a été marqué à l’époque de Ralambo en Imerina (1575-1660). En tous cas, on se demande, quelle est la date exacte ?

Mbolatiana R

Oui, on se demande.

Alors, si Mr Norbert Rakotomalala me fait l'honneur de lire ces lignes, j'aimerais bien qu'il m'explique comment il fait la correspondance entre les noms malgaches et les noms arabes des mois. Et pourquoi il mélange zodiaque et nouvelle Lune.

Pour ma part, je continue à penser que tant qu'on mélangera calendrier zodiacal et calendrier luni-solaire et que tant que l’on continuera à vouloir traiter le problème du Nouvel An malgache de la même manière dans toute l'île, on se demandera encore longtemps : quelle est la date exacte ?

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