Le calendrier hindou

Un peu d'histoire

Commençons par une chronologie de l'Inde (jusqu'à son indépendance) pour nous permettre de nous situer dans le temps. Dans la colonne calendrier les noms des différents textes sur lesquels s'appuie la conception des différents calendriers.

Dates Événements Calendrier
IIIe millénaire civilisation de l'Indus
2 000 à 1 500 av. J.-C. invasion des Aryens dans le sous-continent indien Environ 1500 av. J.C : écriture des **Védas** qui contiennent des références astronomiques.

Les Vedas sont constitués de quatre collections :
- Rig
- Yajus
- Sava
- Atharva

Vers 300-200 av. J.-C. : apparition des **VEDANGAS** (six sujets devant être étudiés pour comprendre les vedas). L'un deux traite d'astronomie : **JYOTISHA**

vers 700-900 apr. J.-C. :**SURYA SIDDHANTA**. Référence astronomique des hindous, il aurait été révélé par le Soleil (Surya)
599 - 527 av. J.-C. vie et mort de Mahavira, fondateur du janaïsme
563 - 483 av. J.-C. vie et mort de Sakya-Muni (Siddharta), le Bouddha
518 - 515 av. J.-C. les Perses de Darius atteignent l'Indus
326 av. J.-C. Alexandre le Grand pénètre en Inde
325 av. J.-C. Alexandre quitte l'Inde en y laissant des garnisons grecques
320 av. J.-C. Chandragupta Maurya chasse les Macédoniens et fonde la dynastie Maurya (320 - 184 av. J.-C.)
273 - 232 av. J.-C. Ashoka, grand empereur indien. Apogée de la dynastie Maurya. Âge d'or de l'Inde. Ashoka se convertit au bouddhisme.
185 av. J.-C. - 500 apr. J.-C. Moyen-Âge de l'Inde
I et IIe siècles av. J.-C. royaumes grecs de Bactriane et du Punjab
455 - 500 apr. J.-C. les Huns visitent l'Inde
712 les Arabes occupent le Sind, province au nord du royaume (sud du Pakistan actuel)
712 - 1000 pillages musulmans de l'Inde
1008 Mahmoud de Ghazna, musulman afghan, dévaste le nord de l'Inde
800 - 1400 royaumes rajpoutes
1 192 occupation de l'Inde du Nord par les musulmans. Delhi devient la capitale de l'Empire musulman indépendant de l'Inde
1193 - 1526 règne du sultanat de Delhi
1288 - 1293 Marco Polo traverse l'Inde
1398 le Turc Tamerlan pille Delhi
1469 - 1538 vie et mort de Nanak, fondateur du sikhisme, doctrine à l'époque non violente
1498 Vasco de Gama aborde devant Calicut, sur la côte de Malabar
1510 les Portugais occupent Goa
1526 fondation de l'Empire moghol par Babur (1483 - 1530), descendant de Tamerlan qui sera étendu par son petit-fils Akbar. La capitale est Delhi
1556 - 1605 règne d'Akbar "le très grand
1569 fondation de Fatehpur Sikri, la nouvelle capitale d'Akbar
1600 ouverture de comptoirs anglais sur les côtes occidentale et orientale
1628 - 1658 Shah Jahan, "Grand Moghol" des Occidentaux
1631 mort de Mumtaz Mahal, épouse de Shah Jahan
1639 fondation de Madras par les Anglais
1664 les Anglais fondent la Compagnie des Indes orientales
1707 fin de l'Empire moghol. Morcellement du pays : rois locaux musulmans et hindous
1742 - 1754 Dupleix fonde l'Empire français des Indes
1763 fin de la guerre franco-anglaise. Suprématie de l'Angleterre
1857 - 1858 révolte des cipayes : grande rébellion contre la domination britannique. Les territoires occupés par les troupes de la Compagnie des Indes orientales passent sous le contrôle des Anglais. Le souverain moghol s'incline face aux Britanniques.
1869 naissance de Gandhi
1877 la reine Victoria devient Impératrice des Indes
1885 création du Congrès national indien, mouvement d'opposition aux Britanniques
1911 le roi Georges V fait transférer la capitale de l'Empire britannique des Indes de Calcutta à New-Delhi
1915 retour d'Afrique du Sud de Gandhi
1920 Gandhi prône la lutte non violente contre les Britanniques
1930 mouvement de désobéissance civique, avec Gandhi
1942 Gandhi lance la campagne "Quittez l'Inde
1947 l'indépendance de l'Inde est proclamée le 15 août. Jawaharlal Nerhu devient Premier ministre. L'ex-Empire britannique se scinde en 2 États : la République indienne et la République islamique du Pakistan.

Les calendriers

Aucun doute. Nous allons bien aborder ici l'étude DES calendriers hindous. Nehru, en 1953, compta l'existence de 30 calendriers en Inde.

Pourquoi cette multitude ?

D'abord de par l'existence de nombreuses religions en Inde qui possèdent leur propre calendrier. Bien entendu, dans cette étude, nous nous limiterons aux calendriers purement indiens de par leur conception. Il n'en reste pas moins vrai que notre étude sera certainement la plus compliquée de toutes les pages de ce site.

Ensuite, de part la cohabitation de différents types de calendrier (solaire et luni-solaires) et de nombreuses variantes dues à l'existence de plusieurs textes de références (veda ou Surya Siddhanta), de différentes méthodes astronomiques de calcul (ancienne ou moderne), de différents noms des mois, de nombreuses dates de début d'année variables, de nombreuses manières d'intercaler les mois complémentaires, d'innombrables ères, etc.

Mais, essayons d'y voir plus clair dans toutes ces versions et prenons les choses logiquement.

Nous allons étudier successivement les calendriers anciens et les calendriers modernes. Nous considérerons comme «anciens» les calendriers qui trouvent leurs sources dans les Vedas et les Vedangas et comme «modernes» les calendriers qui trouvent leurs sources dans Surya Siddhanta.

Une chose est certaine concernant tous les calendriers de l'Inde : ce sont des calendriers ASTRONOMIQUES. Si on groupe les calendriers en deux catégories, calendriers arithmétiques et calendriers astronomiques, les calendriers indiens font partie de la seconde catégorie. Notre calendrier grégorien est un calendrier arithmétique (ou calculé) : l'année compte 365 ou 366 jours, le nombre de jours des mois est connu à l'avance, nous savons positionner le jour bissexte à l'avance, etc.

Les calendriers astronomiques, eux, dépendent entièrement d'événements astronomiques observés (ou calculés astronomiquement) : position d'un corps céleste (étoile, planète, lune, soleil...) ou conjonction entre ces corps à un certain moment. Suivant l'époque, il est tenu compte de valeurs réelles ou de valeurs moyennes.

Les calendriers anciens de l'époque védique

Dans les textes du Rigveda, il est fait mention d'un calendrier de 360 jours divisé en 12 mois de 30 jours.

Le mois est divisé en deux parties : krsna (lune décroissante) et shukla (lune croissante). La nouvelle lune s'appelle amavasya et la pleine lune purnimas.

Bien que les notions de mois intercalaire et de cycle ne soient réellement expliquées que dans le Jyotisha Vedanga, il semble qu'elles aient été connues bien avant.

Il existe, en effet, un cycle de cinq ans nommé Yuga dans lequel chacune des cinq années porte un nom précis. Or, on trouve déjà la trace de deux de ces années dans les textes du Rigveda. De là à penser que le mois intercalaire était aussi connu, il n'y a pas loin.

Les noms des cinq années du cycle varient légèrement d'un texte à l'autre : samvatsara, parivatsara, idavatsava, iduvatsara (ou idvatsara) et vatsara.

On trouve vraiment l'évocation de mois intercalaire dans les textes de Brahmanas et de Mahabharta.

C'est dans Jyotisha Vedanga qu'on en apprend plus sur Yuga, le cycle de cinq ans. Ce cycle se compose de 62 candramashas (mois synodiques), 1830 jours et 1860 tithis (1/30 de mois synodique) et débute au solstice d'hiver. Il y a deux mois intercalaires dans un Yuga : samvatsara et parivatsara.

L'année comptait deux grandes divisions : uttarayana (les levers de soleil se déplacent vers le nord en direction du solstice d'hiver) et daksinayana ((les levers de soleil se déplacent vers le sud en direction du solstice d'été).

L'année était aussi divisée en trois périodes de quatre mois elles-mêmes divisées en 2 saisons. Nous obtenons donc au final six saisons qui sont nommées dans le tableau qui suit et auquel j'ajoute le nom des mois de ces calendriers védiques anciens ainsi que le nom sanscrit de ces mêmes mois tels qu'ils sont désignés dans Jyotisha Vedanga.

Num mois Nom "védique" Saison Mois "sanscrit" Grégorien
1 Madhu Vasanta (printemps) Chaitra mi-mars mi-avril
2 Madhava Vaisakha mi-avril mi-mai
3 Sukra Grisma (saison chaude) Jyaishtha mi-mai mi-juin
4 Suci Ashadha mi-juin mi-juillet
5 Nabhas Varsa (pluies) Sravana mi-juillet mi-août
6 Nabhasya Bhadrapada mi-août mi-septembre
7 Isa Sharad (automne) Asvina mi-septembre mi-octobre
8 Urja Karttika mi-octobre mi-novembre
9 Sahas Hemanta (hiver Margasirsha mi-novembre mi-décembre
10 Sahasya Pausha mi-décembre mi-janvier
11 Tapas Shishira (saison de la rosée) Magha mi-janvier mi-février
12 Tapasya Phalguna mi-février mi-mai

Il est certain que ces calendriers «anciens» étaient plutôt arithmétiques et tenaient compte de valeurs moyennes calculées.

Les calendriers modernes

Nous en arrivons maintenant à la partie la plus intéressante - et peut-être la plus compliquée - des calendriers indiens : les calendriers modernes c'est-à-dire ceux dont il faut chercher les règles de construction dans les textes de Surya Siddhanta qui datent quand même de 700-900 apr. J.-C.

Le découpage étant facile et logique, nous allons diviser notre étude en deux parties : les calendriers solaires et les calendriers luni-solaires.

1) Les calendriers solaires

À partir de maintenant, plus question de construire le calendrier sur des calculs arithmétiques. Ils le seront sur des calculs et ces observations astronomiques. Nous verrons d'ailleurs les problèmes induits à ce genre de calculs.

Si nous nous souvenons de la page astronomie du site, nous savons qu'il existe plusieurs types d'années solaires. Deux d'entre eux vont concerner le calendrier indien : l'année sidérale qui va nous conduire à un système nirayana et l'année tropique qui va générer un système sayana.

Le calendrier solaire basé sur le système sidéral ou nirayana est le calendrier solaire traditionnel utilisé par quatre «écoles dominantes» qui vont décliner chacune ses propres règles.

Le calendrier solaire basé sur le système tropique ou sayana est le calendrier solaire civil officiel né d'une volonté d'uniformisation (c'était le moins qu'on puisse faire !!) des calendriers par le Calendar Reform Committe né en novembre 1952. Nous reparlerons de ce calendrier national né le 22 mars 1957. Mais, pour l'instant, penchons-nous sur le calendrier solaire traditionnel nirayana et ses variantes.

Je vous avais dit que notre étude allait être compliquée !! Pas de panique et continuons notre découpage.

1-a) Les calendriers solaires traditionnels

Ces calendriers vont concerner les régions ou états sur la carte ci-dessous.

Les cartes sont établies à partir d'une étude de Leow Choon Lian, élève du Professeur Helmer Aslaksen du département de mathématiques de la faculté des sciences à l'université de Singapour. Cette étude, après vérifications par ailleurs, m'a aussi inspiré le texte des pages sur le calendrier indien. Merci au Professeur Helmer Aslaksen pour la toujours très grande qualité de ses textes et de ceux de ses étudiants.

Précisons tout de suite qu'un jour solaire (vasara ou panchang) dure d'un lever de soleil au lever de soleil suivant.

L'année

L'année est une année sidérale. Pour ceux qui auraient oublié, je rappelle le principe de l'année sidérale : c'est la durée d'une révolution de la Terre autour du Soleil, c'est-à-dire le temps qui s'écoule depuis l'instant où une étoile supposée fixe, le soleil et la terre étant sur une même droite reviennent tous trois dans la même position. La durée moyenne d'une année sidérale est d'environ 365 jours 6 heures 9 minutes 12,96 secondes soit 365,2564 jours. Elle est donc plus longue d'environ 20 minutes que l'année tropique.

Dans le calendrier solaire traditionnel hindou, le point fixe à prendre en considération est défini dans Surya Siddhanta : c'est le point directement opposé à la brillante étoile Chitra (Spica dans la constellation de la Vierge ou, pour les astronomes alpha Vir, HR5056). La longitude de Chitra par rapport à ce point est donc de 180°. En 285 apr. J.-C. ce point correspondait à l'équinoxe de printemps. De par la précession des équinoxes, il est maintenant à 23°50 environ de point initial.

La durée de l'année nirayana définie dans Surya Siddhanta était de 365,258756 jours qui est plus longue de 3'27 par rapport aux mesures actuelles.

À ce sujet, il existe deux écoles (Eh ou i! encore ! !) pour calculer les panchang (ou panjika) hindous. Le panchang est une sorte d'éphéméride qui contient des informations sur les fêtes à célébrer, des données astronomiques et astrologiques). L'école moderne utilise des méthodes modernes de calculs astronomiques alors que la «vieille école des purs de durs» s'en tient aux règles de calculs édictées par Surya Siddhanta. Heureusement, il semble que l'ancienne école tende à adopter les méthodes modernes de calcul.

Les mois solaires

L'écliptique est divisée en 12 secteurs égaux de 30° identiques aux signes zodiacaux des Babyloniens. Chaque secteur se nomme rasi. L'entrée du soleil dans un rasi s'appelle samkranti et le premier samkranti correspond évidemment avec le début de l'année nirayana.

La longueur d'un mois correspond au temps pris par le soleil pour passer d'un samkranti au suivant et, donc, de parcourir un rasi entier. Dans la plupart des calendriers solaires, le mois porte le nom du rasi que le soleil parcourt. Mais, là aussi, il existe des variantes. La durée des mois est déterminée par calcul astronomique et, du fait du caractère elliptique de l'orbite terrestre, varie en longueur.

Avant d'aller plus loin, prenons connaissance de la longueur moyenne des mois, de leur nom ainsi que de celui des rasi.

Rasi Latin Nom mois dans la plupart des calendriers Nom mois tamouls * Nom mois Malayalam Durée moyenne Calendrier occidental
Mesha Bélier Vaisakha Chittirai Mesha 30,9 Avril-mai
Vrisha Taureau Jyaistha Vaikasi Vrisha 31,4 Mai-juin
Mithuna Gémeaux Ashadha Ani Mithuna 31,6 Juin-juillet
Karkata Cancer Sravana Adi Karkata 31,5 Juillet-août
Simha Lion Bhadrapada Avani Simha 31,0 Août-septembre
Kanya Vierge Asvina Purattasi Kanya 30,5 Septembre-octobre
Tula Balance Kartika Arppisi Tula 29,9 Octobre-novembre
Vrischika Scorpion Agrahayana
Margasirsha
Karthigai Vrischika 29,5 Novembre-décembre
Dhanus Sagittaire Pausha Margali Dhanus 29,4 Décembre-janvier
Makara Capricorne Magha Thai Makara 29,5 Janvier-février
Kumbha Verseau Phalguna Masi Kumbha 29,8 Février-mars
Mina Poissons Chaitra Panguni Mina 30,3 mars-Avril

* À noter que le calendrier tamoul possède des particularités propres que nous examinerons plus loin. Les mois sur fond jaune sont les premiers mois de l'année.

En pratique, les hindous donnent une longueur entière aux mois : si la décimale de la durée est supérieure ou égale à 5, le mois aura un nombre de jours égal à la partie entière + 1.

Un mois peut donc avoir un nombre de jours variant de 29 à 32.

Il existe plusieurs règles selon le type de calendrier pour fixer le jour qui va débuter un mois. Voici les quatre principales :

Quelles que soient les règles utilisées, nous aurons, la plupart du temps, des années de 365 jours. Comme l'année sidérale compte réellement 365,2564 un calcul simple 1/(365,2564 - 365) = 3,9002 nous fait constater que nous aurons une année de 366 jours tous les quatre ans. De par les différentes règles de comptage, ces années de 366 jours ne se produiront pas toutes en même temps dans les différents calendriers. Facile de s'y retrouver, non ?

1-b) Le calendrier solaire national

C'est bien pour mettre fin à cette multiplicité des calendriers que le calendrier national officiel a vu naissance le 22 mars 1957. Est-il arrivé à ses fins ? Quand on connaît la force de la tradition, surtout quand elle s'enracine dans le sacré, on peut se permettre d'en douter et de se demander si nous n'avons pas, tout simplement, un calendrier de plus en Inde.

Voyons ce qu'il en est de ce calendrier :

Nous en arrivons donc au tableau suivant :

Num. mois Nom Durée Date de début dans le calendrier grégorien
1 Chaitra 30 ou 31 21 ou 22 mars
2 Vaisakha 31 21 avril
3 Jyaishtha 31 22 mai
4 Ashadha 31 22 juin
5 Sravana 31 23 juillet
6 Bhadrapada 31 23 août
7 Asvina 30 23 septembre
8 Kartika 30 23 octobre
9 Agrahayana ou
Margasirsha
30 22 novembre
10 Pausha 30 22 décembre
11 Magha 30 21 janvier
12 Phalguna 30 20 février

Je vous propose de poursuivre notre étude des calendriers hindous où nous examinerons successivement :

Note : les deux pages ont été réunies en une seule, ci-dessous la deuxième page.

2) Les calendriers luni-solaires

À partir de maintenant, plus question de construire le calendrier sur des calculs arithmétiques. Ils le seront sur des calculs et des observations astronomiques. Nous verrons d'ailleurs les problèmes induits à ce genre de calculs.

Comme dans tout calendrier luni-solaire, c'est la lune qui va servir d'unité : l'année sera composée de 12 mois lunaires. Et comme 12 mois lunaires ne font pas une année solaire, il y aura, de temps à autre intercalation d'un mois complémentaire dans l'année.

Le mois sera donc l'intervalle de temps qu'il faut à la lune pour passer d'un certain état à ce même état x jours plus tard.

Dans ses différentes phases, la lune passe par deux phases facilement remarquables : la pleine lune et la nouvelle lune.

Connaissant la variété de calendriers indiens, il fallait s'attendre à ce que certains calendriers construisent le mois lunaire à partir du cycle Nouvelle lune-Nouvelle lune suivante et d'autres à partir du cycle Pleine lune-Pleine lune suivante. Gagné !! Ils l'ont fait !

Nous allons donc étudier deux grands types de calendriers luni-solaires indiens :

2-a) Les calendriers amanta (ou mukhyamana)

Ces calendriers vont concerner les régions ou états de la carte ci-dessous.

Chaque mois du calendrier amanta a un nombre entier de jours.

Le calendrier est construit de manière à être en phase avec l'année nirayana.

Pour ce faire, le mois lunaire amanta va porter, en général, le nom du mois solaire dans lequel tombe son premier jour. Le mois solaire concerné commence au moment exact où il entre dans son samkranti et se termine au moment ou il atteint le samkranti suivant.

Il fallait s'attendre à des variantes et nous en avons. Elles portent à la fois sur le nom du mois débutant l'année et sur le début de l'ère. Le tableau suivant résume ces variantes :

Calendrier "chaitra" Calendrier "Kartika" Calendrier "Ashadha"
Mois 1 Chaitra Kartika Ashadha
2 Vaisakha Agrahayana ou Margasirsha Sravana
3 Jyaishtha Pausha Bhadrapada
4 Ashadha Magha Asvina
5 Sravana Phalguna Kartika
6 Bhadrapada Chaitra Agrahayana ou Margasirsha
7 Asvina Vaisakha Pausha
8 Kartika Jyaishtha Magha
9 Agrahayana ou Margasirsha Ashadha Phalguna
10 Pausha Sravana Chaitra
11 Magha Bhadrapada Vaisakha
12 Phalguna Asvina Jyaishtha
Ère * Ère Saka (souvent)
Ère Vikrama (quelquefois)
Ère Vikrama Ère Vikrama

* Pour en savoir plus sur les ères, allez à la fin de la page.

Pour la suite sur le calendrier amanta et pour plus de clarté dans le propos, nous nous en tiendrons au calendrier chaitra. À vous d'adapter ce qui est écrit aux autres types de calendriers amanta.

Comme nous l'avons déjà évoqué plus haut, une année amanta (année lunaire de 12 mois lunaires) est plus courte qu'une année nirayana (année solaire sidérale). Pour que l'année lunaire garde le contact avec l'année solaire, il faudra ajouter périodiquement un mois lunaire à l'année lunaire pour «rattraper» le temps perdu. Cette année lunaire (embolismique) comportera donc 13 mois au lieu des 12 habituels. Mais comment faire et quand intercaler ce mois supplémentaire ?

Il est hors de question d'utiliser des règles arithmétiques dans un calendrier «astronomique». Exit donc l'application du cycle de Méton. Heureusement, certains événements astronomiques indirects vont nous aider à régler ce problème.

Nous avons vu dans la première partie que la durée des mois solaires est variable. Nous verrons plus loin qu'il en est de même pour les mois lunaires. Nous avons vu aussi que le mois lunaire porte le nom du mois solaire dans lequel il débute (nouvelle lune).

De par la différence de longueur du mois solaire et du mois lunaire, il arrive donc que le mois solaire «contienne» entièrement le mois lunaire. Et, par conséquent, ce mois solaire va «contenir» deux nouvelles lunes. Et comme un mois solaire ne doit, selon la règle, ne contenir qu'une nouvelle lune, nous tenons notre événement et nous allons pouvoir rajouter le fameux mois complémentaire :

Le mois amanta qui débute à la première nouvelle lune contenue dans le mois solaire sera considéré comme le mois complémentaire et son nom comportera le préfixe adhika (ou mala). Le mois suivant ce mois «spécial» sera le mois normal et son nom comportera le préfixe **suddha (**ou Nija).

Prenons un exemple : le mois solaire Vaisakha contient deux nouvelles lunes N1 et N2. La troisième nouvelle lune N3 est dans le mois solaire suivant. Le mois solaire N1-N2 va s'appeler adhika-Vaisakha et le mois solaire N2-N3 va s'appeler suddha-Vaisakha.

Cet ajout d'un mois complémentaire se produit généralement tous les 2 ans et 4,9,10,11 mois ce qui donne, en moyenne, 2 ans 8,2 mois. Un rapide calcul sur 19 ans et nous en arrivons à 7 mois complémentaires pour cette période. Le cycle de Méton est retrouvé et le calcul astronomique rejoint le calcul arithmétique.

Cette idée originale de nommer les mois et d'intercaler des mois complémentaires va, malheureusement, se retourner contre le calendrier amanta.

En effet, le processus inverse de la double nouvelle lune dans un mois solaire peut se produire pour les trois mois les plus courts de l'année solaire (Agrahayana, Pausha ou Magha) : Un mois solaire ne contiendra aucune nouvelle lune et le mois lunaire sera, ce que j'appelle «orphelin» (kshaya pour les Indiens). Certes, cet événement est beaucoup plus rare que le phénomène adhika puisqu'il n'arrive qu'à des intervalles de 4,19,65,76,122,141 ans, mais il faut bien lui trouver une solution.

Avant de poursuivre en évoquant les différentes solutions, précisons bien les problèmes des mois à deux noms et des mois sans nom :

Posons ce problème visuellement :

Dans la figure, le mois solaire 9 (Pausha) ne contient aucune nouvelle lune et de ce fait le mois lunaire correspondant devient kshaya. Il faut donc lui trouver un nom parmi les douze connus.

Nous remarquons tout d'abord une chose : le mois 6 (asniva) et le mois 12 (chaitra) contiennent chacun deux nouvelles lunes.

Ce phénomène est systématique : un mois lunaire kshaya est toujours précédé d'un mois adhika et suivi d'un mois adhika (avec une fourchette de trois mois avant et après). De cette constatation va venir la solution pour nommer le mois lunaire orphelin.

Et, bien entendu, différentes écoles vont traiter ce problème à leur façon :

Pour y voir plus clair, nommons nos mois en appliquant les règles de ces trois écoles :

Divisions du mois du calendrier amanta : le tithi

Le début et la durée du jour lunaire (tithi) sont basés sur la différence de longitude entre la position du soleil et celle de la lune.

Il y a 30 tithis dans un mois amanta et un tithi correspond à la durée pendant laquelle la distance angulaire de la lune au soleil augmente de douze degrés (1/30 de 360°). Ils sont numérotés en commençant à partir de la nouvelle lune.

Les 15 premiers tithis constituent sukla pasksha qui correspond à la période pendant laquelle la lune croît. Ils portent des numéros de 1 à 15 avec S pour préfixe.

Les 15 derniers tithis constituent krinshna pasksha qui correspond à la période pendant laquelle la lune décroît. Ils portent des numéros de 1 à 15 avec K pour préfixe.

Chaque tithi de sukla pasksha et de krinshna pasksha qui a le même numéro porte le même nom sauf le tithi 15.

Num. Lettre préfixe Nom Phases de lune
1 S ou K Pratipada
2 S ou K Dvitiya
3 S ou K Tritiya
4 S ou K Charturthi
5 S ou K Panchami
6 S ou K Sashthi
7 S ou K Saptami
8 S ou K Ashtami
9 S ou K Navami
10 S ou K Dasami
11 S ou K Ekadasi
12 S ou K Dvadasi
13 S ou K Trayodasi
14 S ou K Chaturdasi
15 S Purnima
30 K Amavasya

Les déplacements de la lune et du soleil (de la terre) n'étant pas uniformes, les tithis n'ont pas la même durée. La durée moyenne est de 23H37min30 (23,625 heures) mais peut varier de 19,48H à 26,78H.

Chacun des 29 ou 30 jours du calendrier amanta est affecté du numéro de tithi en cours au lever du soleil.

Nous allons retrouver ici le même phénomène que dans les mois de l'année. Un tithi peut très bien commencer après le lever du soleil et finir avant le prochain lever. Dans ce cas, son numéro sera ignoré dans le calendrier et ce sera un jour kshaya. De la même façon, un jour tithi peut très bien contenir deux levers de soleil et, dans ce cas, le numéro de jour tithi est affecté aux deux jours. Le second étant un jour complémentaire. La numérotation des jours d'un mois dans le calendrier amanta n'est donc pas continue.

2-b) Le calendrier purnimanta (ou gaunamana)

Ce calendrier va concerner les régions ou états suivants :

Le calendrier purnimanta, comme le calendrier amanta, utilise le mois lunaire pour construire l'année lunaire. Ces deux calendriers ont donc des caractéristiques communes :

Mais, vous vous souvenez que si le mois amanta court d'une nouvelle lune à une autre nouvelle lune, le calendrier purnimanta va couvrir, lui, une période entre deux pleines lunes.

Le mois purnimanta va commencer environ 15 jours avant le mois amanta correspondant (le nom des mois est identique dans les deux calendriers).

Du fait de ce décalage, le mois purnimanta «couvre» au moins la moitié du mois solaire.

L'année purnimanta commence en même temps que l'année amanta de type «chaitra». Ce qui signifie qu'elle commence au milieu de mois chaitra dans le calendrier purnimanta. La première moitié (vadi) de chaitra appartient donc à l'année précédent l'année en cours.

On peut se demander quel est l'intérêt d'une telle année purnimanta qui semble être la copie conforme de l'année amanta avec des inconvénients en plus. Notamment de faire débuter l'année en plein milieu d'un mois. Si quelqu'un a des idées sur l'avantage de l'année purnimanta, qu'il me fasse signe.

La semaine indienne

Comme nous, les Indiens utilisent la semaine de 7 jours et, comme nous, ils la font commencer le lundi.

Les noms des jours sont les suivants :

Français indien
Lundi Somavara
Mardi Mangalavara
Mercredi Budhavara
Jeudi Vrihaspativara ou Guruvara
Vendredi Sukravara
Samedi Sanivara
Dimanche Ravivara

Les cycles

Le cycle principal des années est le mahayuga ou chaturyuga de 4 320 000 années. Il est divisé en quatre périodes comptées en années humaines et années divines (360 années humaines). Voici ce cycle et ses périodes :

Cycle Durée
Mahayuga 4 320 000 ans
Satyayuga ou âge d'or 1 728 000 années humaines
4 800 années divines
Tretayuga ou âge d'argent 1 296 000 années humaines
3 600 années divines
Dvaparayuga 864 000 années humaines
2 400 années divines
Kaliyuga ou âge du fer 432 000 années humaines
1 200 années divines

L'actuel Kaliyuga a commencé à minuit le 18 février 3102 av. J.-C. Inutile de vous dire qu'on y est encore pour un certain temps.

Les ères

Nous allons nous en tenir aux principales ères directement liées aux calendriers étudiés. En effet, le nombre des ères en Inde est très important. Certaines sont liées aux calendriers d'origine étrangère, d'autres à des variantes locales des calendriers solaires ou lunaires.

Ère Début dans le calendrier grégorien Régions
Calendriers solaires
Kali Année + 3101 de mi-avril à décembre
Année + 3100 de janvier à mi-avril
Pour tous calendriers solaires et lunaires
Saka
calendrier national
Année - 78 du 22 mars à décembre
Année - 79 de janvier au 21 mars
Uniquement dans le calendrier national
Saka
traditionnel
Année - 78 de mi-avril à décembre
Année - 79 de janvier à mi-avril
Tamil Nadu, Orissa, Punjab.
Bengali San Année - 593 de mi-avril à décembre
Année - 594 de janvier à mi-avril
Bengale Occidental, Assam, Tripura
Kollam Année - 824 de mi-août à décembre
Année - 825 de janvier à mi-août
Kerala
Calendriers luni-solaires
Salivahana Saka Année - 78 de mars/avril à décembre
Année - 79 de janvier à mars/avril
Maharashtra, Andhra, Pradesh, karnataka.
Vikram Samvat
(Chaitradi )
Année + 57 de mars/avril à décembre
Année + 56 de janvier à mars/avril
Uttar Pradesh, Madhya Pradesh, Bihar, Rajasthan et Nord-Ouest de l'Inde
Vikram Samvat
(Kardikadi)
Année + 57 de octobre/novembre à décembre
Année + 56 de janvier à octobre/novembre
Gujarat et partie du rajasthan
Vikram Samvat
(Ashadadi)
Année + 57 de juin/juillet à décembre
Année + 56 de janvier à juin/juillet
Kutch et partie du Kathiawar

À la lecture de ce tableau, on peut constater qu'il n'y a pas de lien entre la structure d'un calendrier et l'ère adoptée. L'ère Vikran est utilisée au nord de l'Inde où le calendrier purnimanta est usité mais aussi au Gujarat qui connaît le calendrier armanta. L'ère Saka est utilisée au sud de l'Inde où les calendriers amanta sont usités. Elle l'est aussi là où existent les calendriers solaires.

Kali ahargana

Les Indiens connaissent depuis plus longtemps que nous un système de comput du temps continu et indépendant de tout calendrier : l'ahargana. C'est l'équivalent de notre jour julien. Il a été inventé par un astronome Hindou (né en 476), Aryabhata I et son point de départ se situe le 17 février - 3101 à minuit. Le temps de référence actuel est l'Indian Standard Time (IST).

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