Les calendriers martiens

Conseil : Avant de lire la suite de cette page, il est conseillé à ceux qui ne maîtrisent pas les bases de l'astronomie de lire la page consacrée à cette science qui est ici. C'est vraiment basique et ne devrait pas donner lieu à une «prise de tête» insupportable. Et une rapide lecture de la partie «saisons astronomiques» de la page consacrée aux saisons ne serait pas de trop non plus.

De plus, si vous voulez en savoir plus sur Mars et ses satellites, n'hésitez pas à visiter le site de P. Labrot ici.

Quelques instants de détente

Après la lecture de toutes ou parties des pages de ce site consacrées aux calendriers ou aux études sur le temps, nous avons bien mérité de nous accorder quelques instants de détente.

Pourquoi ne les mettrions-nous pas à profit pour faire quelques travaux pratiques sur les calendriers ? Construire, par exemple, le calendrier qui pourrait être utilisé sur une autre planète si l'envie d'aller y passer nos vacances nous prenait.

Et pourquoi ne pas prendre pour terrain de notre expérience la planète la plus proche de nous : Mars ?

Si vous êtes partant pour cette séance de découpe du temps martien, nous allons, dans un premier temps, prendre connaissance des caractéristiques de Mars qui nous seront utiles pour la fabrication de notre calendrier et les compareront à celles de la Terre. Puis, nous fabriquerons le squelette du calendrier en ne manquant pas de le comparer à ceux qui ont été fabriqués au cours des dernières décennies.

Parce que, il faut bien le dire les «calendriers martiens» ne manquent pas et nous visiterons LE site de référence en la matière : Martian Time (Note : le site a disparu, mais il existe Mars24 Sunclock). Ce site est le summum de ce qu'on peut faire sur le sujet. On y trouve absolument tout et son auteur, Thomas Gangale, a droit à un énorme coup de chapeau. Ajoutons qu'il est lui-même auteur d'un calendrier martien qui n'est pas le moins connu, le calendrier darien (d'après le prénom de son fils Darius).

En attendant, je vais me permettre un petit reproche concernant Martian Time : ce site est un vrai «foutoir» et une chatte n'y retrouverait pas ses petits. J'essayerai donc de vous indiquer où est quoi avec le plus de précision possible.

Caractéristiques comparées de la terre et de mars

Voyons les sous forme de tableau sans oublier que seules celles concernant de près ou de loin la création d'un calendrier et quelques données générales ont été notées.

Attention : les proportions des images ne sont pas respectées Mars Terre
Caractéristique Index Valeur pour Mars Valeur pour la Terre
Diamètre équatorial 6 794 km (0,5326 celui de la Terre) 12 756,28 km
Distance à l'aphélie 1 249,23 millions de km 152,10 millions de km
Distance au périhélie 2 206,65 millions de km 147,10 millions de km
Distance moyenne au Soleil 227,94 millions de km 149,60 millions de km
Excentricité de l'orbite 3 0,09340 0,01671
Inclinaison de l'équateur sur l'écliptique 4 25,19° soit 25° 12' 23,45° soit 23°27'
Température à la surface -123°/+37°C 15°C en moyenne
Période de rotation sidérale 5 24,622 962 heures
24 h 37 min 22 s
23,9345
23 h 56 min 4 s
Jour solaire moyen 6 24,65973 h
24 h 39 min 35 s
24,0000 h
24h 00 min 00 s
Période de révolution sidérale 7 686,996 j
668,6146 sols
365,2564 j
365 j 6 h 9 min 12,96 s
Période de révolution anomalistique 8 686,980 j
668,5991 sols
365,2596 j
365 j 6 h 13 min 49,44 s
Période de révolution à l'équinoxe vernal 9 686,972 j
668,5907 sols
365,2424 j
365 j 5 h 49 min 3,34 s
Période de révolution au solstice d'été 10 686,968 j
668,5880 sols
365,2416 j
365 j 5 h 47 min 54,24 s
Période de révolution à l'équinoxe d'automne 11 686,974 j
668,5940 sols
365,2420 j
365 j 5 h 48 min 28,80 s
Période de révolution au solstice d'hiver 12 686,976 j
668,5958 sols
365,2427
365 j 5 h 49 min 29,28 s
Période de révolution tropique 13 686,973 j
668,5921 sols
365,2422 j
365 j 5 h 48 min 46,08 s

Belle brochette de chiffres, non ? Nous allons en commenter quelques-unes selon leur index.

1 - 2 : aphélie : point de l'orbite le plus éloigné du Soleil. Périhélie : point de l'orbite le plus proche du Soleil. Voir le paragraphe 2 de la partie Saisons astronomiques sur la page consacrée aux saisons.

3 : Elle varie entre 0 et 1. Le degré d'aplatissement de l'ellipse est d'autant plus grand que l'excentricité se rapproche de zéro. L'orbite de Mars est donc légèrement moins aplatie que celle de la Terre. Voir le paragraphe 2 de la partie Saisons astronomiques sur la page consacrée aux saisons.

4 : Cette inclinaison, expliquée dans la partie «Deuxième étape : rotation et obliquité» de la section Saisons astronomiques sur la page consacrée aux saisons, fait qu'on peut considérer que, comme sur Terre, il y a des saisons astronomiques sur Mars.

Les données 5 et 6 concernent la durée de mouvement des planètes autour de leur axe alors que les données 7 à 13 concernent le temps qu'elles mettent à parcourir leur orbite (avec des points de repère différents). Nous allons pour l'instant oublier la notion de «sol» sur laquelle nous reviendrons plus tard.

5 : la rotation sidérale est le temps au bout duquel la planète retrouve la même orientation par rapport aux étoiles environnantes.

6 : le jour solaire moyen est la moyenne d'un très grand nombre de jours dont l'intervalle de temps est compris entre deux passages consécutifs du soleil au même méridien. Encore faut-il que des méridiens aient été définis sur Mars... mais bon... on va faire comme si.

7 : L'année anomalistique est le temps que la planète emploie à retourner à son périhélie (c'est-à-dire le temps qui s'écoule depuis le moment où le Soleil est dans son apogée jusqu'à celui où il y arrive de nouveau, après une révolution entière).

8 à 13 : Voir la partie «Cinquième étape : quatre saisons font une année» de la section Saisons astronomiques sur la page consacrée aux saisons.

Construction des calendriers martiens

Oublions les calendriers «lunaires»

Comme il existe sur Terre des calendriers lunaires basés sur la durée des lunaisons pourquoi ne pas imaginer des mois qui seraient basés sur les périodes synodiques (une période synodique correspond à deux passages de la Lune à la même position dans le ciel par rapport au Soleil) d'un des deux satellites de Mars que sont Phobos et Deimos ?

Mais, il nous faut vite oublier cette idée.

Non pas parce que ce serait faire trop d'honneur à ces deux «vulgaires cailloux» en forme de patate que de vouloir les comparer à la Lune majestueuse qui embellit notre ciel nocturne.

Phobos et Deimos sont deux minuscules «patatoïdes» qui ont la forme de ce que les mathématiciens nomment «ellipsoïde» à trois axes. Petite ressemblance avec la Lune : les deux satellites présentent toujours la même face (partie a sur les schémas) vers Mars.

Photos couleur sous deux angles prises par la mission Mars Reconnaissance Orbiter
Photos couleur sous deux angles prises par la mission Mars Reconnaissance Orbiter NASA/JPL-Caltech/University of Arizona

Deimos (sans accent sur le e S.V.P.) (15 km x 12 km x 11 km) est un des plus petits satellites naturels du système solaire (Rappel : diamètre de la Lune = 3 476 km). Il orbite à 23 459 km au-dessus du sol martien (384 000 km pour la Lune par rapport à la Terre).

Photo en couleur de 2008 prise par la mission Mars Reconnaissance Orbiter
Photo en couleur de 2008 prise par la mission Mars Reconnaissance Orbiter NASA / JPL-Caltech / University of Arizona, Public domain, via Wikimedia Commons

Phobos (27 km x 21 km x 18 km) est aussi un des plus petits satellites naturels du système solaire (Rappel : diamètre de la Lune = 3 476 km). Il orbite à 9 380 km au-dessus du sol martien (384 000 km pour la Lune par rapport à la Terre).

Si nous devons oublier cette idée de calendriers lunaires, c'est tout simplement que les périodes de révolution de Phobos et de Deimos sont respectivement de 7,65 h (7 h 39 min) et de 30,30 h (30h 18 min). Reconnaissons que ce serait quand même un peu court pour faire d'une de ces révolutions un mois de calendrier. À un point tel que si on construisait des mois «Phobosiens», ceux-ci seraient plus courts que la durée d'un jour martien !!

Vers un calendrier solaire : deux unités incontournables, le jour et l'année

L'idée d'un calendrier martien lunaire étant écartée il ne nous reste plus qu'à faire classique et nous diriger vers un calendrier solaire dont nous devons définir les principales unités que sont le jour (au travers de la notion d'heure) et l'année.

Quant au reste, mois et semaines, ce n'est que la résultante d'un découpage laissé à l'initiative de chacun qui aura, bien entendu, les meilleures raisons du monde pour le faire adopter.

Le jour martien : combien d'heures ?

Nous avons vu dans le tableau des caractéristiques que le jour solaire moyen sur Terre est, et pour cause, de 24 h 00 min 00 s contre 24 h 39 min 35,24409 s sur Mars.

La différence n'est donc pas très grande (2,75% en plus sur Mars) et on serait tenté de conserver le modèle terrestre heures (24)/minutes (60)/secondes (60) en ajustant un tantinet la durée de la seconde qui passerait à 1,02749125 s «terrestre».

Gardons nos vieux réveils et vieilles montres mécaniques. Leur avenir est devant eux... sur Mars !! Il suffira de déplacer le réglage vers S (slow) pour que la seconde terrestre devienne la seconde martienne. Et comme la gravité martienne ne vaut qu'un tiers de la gravité terrestre, le réveil ne pèsera guère plus que la montre.

Le modèle terrestre a été conservé par bon nombre de concepteurs de calendriers martiens mais d'autres en ont profité pour donner libre cours à leur imagination et, pour certains, d'imaginer un modèle décimal qui n'aurait pas déplu aux auteurs du calendrier républicain de 1792.

Notons une chose importante : pour différencier le jour terrestre du jour martien quant à sa durée, les inventeurs de calendriers martiens ont aussi inventé un nom à la durée du jour solaire martien . Là aussi les options sont multiples et vont, comme on peut le voir sur la page de Martian Time de dar, Mday, antoi à... day. Mais il semble que sol l'emporte depuis 1976 et les premières missions Viking Lander.

L'année martienne : combien de jours (ou de sols) ?

La durée de la journée étant trouvée, il nous faut maintenant passer à une étape suivante qui sera de déterminer le nombre de sols de l'année martienne.

Nous allons nous pencher plus particulièrement sur la liste des différents calendriers inventés depuis le début du XXe siècle et qui figuraient sur le site Martian Time.

Nous avons constaté plus haut (tableau des caractéristiques des planètes) que, selon le point de départ du décompte (équinoxe ou solstice) la durée d'une année variera entre 668,5880 sols et 668,5958 sols avec une année tropique moyenne de 668,5921 sols.

Comme le nombre de jours d'une année ne peut pas être autre chose qu'un nombre entier, on peut imaginer que le nombre de jours de l'année martienne sera de 668 sols avec un système d'intercalation du style année bissextile pour compenser le décalage entre les 668 sols de l'année et les 668,xxxx sols de la période vraie de révolution.

On retrouve ce principe dans le tableau des différentes moutures inventées avec, en majorité, une année de 668 sols et l'intercalation de quelques jours pour compenser au plus vite l'écart. Rien que de très classique.

Tout calendrier a une époque c'est-à-dire une date de départ qui correspond à une date précise dans un calendrier de référence. Et, bien entendu, les propositions n'ont pas manqué pour le calendrier martien. On trouve ainsi le début de la période julienne (1er janvier 4713 av. J.-C.), le début de notre ère (1er janvier 1), l'atterrissage de Viking 1 (20 juillet 1976) et bien d'autres.

N'oublions pas non plus de nous demander si l'ère martienne doit débuter un an 0 ou un an 1. Les réponses varient. Il est quand même dommage de constater qu'un simple décompte de sols au moment de l'atterrissage de sondes spatiales n'ait même pas été synchronisé : sol 0 pour les Vikings, sol 1 pour d'autres, sol 1 pour Opportunity et Spirit alors que leur atterrissage est séparé de 22 sols.

En guise de conclusion

En fin de compte, si nous faisons le bilan de la construction d'un calendrier martien nous ne trouvons rien que nous ne connaissions déjà si nous avons suivi l'évolution de la naissance d'un calendrier solaire, julien puis grégorien par exemple.

Quand on visite le site Martian Time on ne peut pas ne pas se demander : tout ça pour quoi ?

On compte près de 90 moutures de calendriers martiens dans la liste que nous avons étudiée. Chacun y va de son nombre de jours dans la semaine, le mois, l'année, de son nombre de semaines dans le mois, de son nombre de mois dans l'année, de sa liste de noms de jours de la semaine, de noms de mois de l'année, que sais-je encore ?

Pour ma part, j'ai une réponse à ma question. Elle est «a moins que ce ne soit pour se faire plaisir, c'est tout ça pour rien».

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