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Origine
L’horoscope désigne originellement la carte du ciel de l’heure de naissance d’un individu. En grec, le terme se compose de hora (heure) et skopein (examiner)1. L’horoscope est en lui-même un document astronomique2.
La pratique de l’horoscope dépend de l’astrologie généthliaque. Selon cette dernière, les conjonctions astrales à l’instant de la naissance d’un individu jouent un rôle sur son caractère et son destin.
L’horoscope est utilisé en astrologie judiciaire, qui traduit le « jugement » supérieur des astres. L’horoscope permet alors à l’astrologue de prédire à l’intéressé ce qui doit lui arriver dans tout le cours de sa vie3.
Compte tenu de la complexité des calculs, l’érection de l’horoscope a longtemps été limitée aux souverains et dirigeants. À travers leur horoscope, le sort de toute la communauté était observé.
Glissement
L’horoscope est de nos jours souvent associé aux prédictions astrologiques délivrées pour la journée, la semaine, le mois ou encore l’année. Elles sont alors communes à tous les natifs d’un même signe astrologique, dont l’étendue est déterminée par des dates.
| Signe astrologique | Dates |
|---|---|
| Bélier | 21 mars au 20 avril |
| Taureau | 21 avril au 20 mai |
| Gémeaux | 21 mai au 21 juin |
| Cancer | 22 juin au 22 juillet |
| Lion | 23 juillet au 22 août |
| Vierge | 23 août au 22 septembre |
| Balance | 23 septembre au 22 octobre |
| Scorpion | 23 octobre au 22 novembre |
| Sagittaire | 23 novembre au 21 décembre |
| Capricorne | 22 décembre au 20 janvier |
| Verseau | 21 janvier au 19 février |
| Poissons | 20 février au 20 mars |
Connaître mon horoscope
Pour ériger un horoscope personnalisé, trois informations suffisent : la date, l’heure et le lieu de naissance (longitude et latitude).
Pour connaître votre carte du ciel de naissance, découvrez notre outil.
La position des planètes, excepté la Lune, sera sensiblement la même entre deux personnes nées le même jour. Celle des maisons variera assurément, à moins que ces personnes partagent la même heure et le même lieu de naissance4.
La carte du ciel obtenue sert de support à l’interprétation du thème astral.
Lire notre page Symbolique et Interprétation.
Une curiosité mal placée ?
Avec l’horoscope individualisé émergent les présages de naissance. Grâce à lui, l’homme essaie de percer les secrets de l’avenir et satisfait sa curiosité naturelle. Cette curiosité ouvre la voie à certaines dérives prédictives.
En 1695, l’astrologue Villeclerc offre à Louis XIV un horoscope dans lequel il avait calculé l’espérance de vie des autres souverains5. Cette démarche audacieuse lui vaut d’être embastillé en 1701 : « Entêté de sa vaine science de figures et de divinations astronomiques, [Villeclerc, fameux astrologue] poussait sa curiosité ridicule et criminelle jusqu’à mesurer la vie des princes et celle des rois mêmes ; il faisait des talismans et prédisait l’avenir aux personnes curieuses et assez simples pour ajouter foi à ses figures. »6
Vouloir prédire la mort conduit à une forme de vanité, conférant parfois à l’absurde. En témoignent les propos d’un médecin-astrologue sur le sort d’un garçon né le 23 décembre 1668 : « À 21 ans, 254 jours et 11 heures, la Lune au sextile droit de Vénus promet amitié avec des femmes et ensuite quelque maladie galante. À 22 ans et 16 heures, Mars au carré droit de Jupiter menace danger de la vie pour raison de la susdite maladie […]. À 23 ans, 88 jours et 16 heures, [la sus dite maladie conduira à une amputation, et] à cause de la rétrogradation de Mercure, de laquelle amputation, la fièvre s’ensuivra très ardent et 36 jours et 3 heures après le Soleil arrivant à l’angle occidental, mettra la personne dans le cercueil, et ce suivant le temps donné. »7
Essor grâce à la presse
L’horoscope, dans son acception moderne, se popularise au début du XXe siècle grâce à la presse. Le phénomène commence dans les années 1930 au Royaume-Uni, puis s’étend rapidement à toute l’Europe.
Naissance de la princesse Margaret
À l’été 1930, la famille royale britannique attend l’arrivée du deuxième enfant du prince de Galles, futur George VI. La princesse Margaret, sœur cadette de la future reine d’Angleterre Élisabeth II, naît le jeudi 21 août. L’événement fait les gros titres dans la presse. John Gordon, co-rédacteur en chef de l’hebdomadaire Sunday Express dont la sortie a lieu trois jours après la naissance royale, est contraint de traiter le sujet sous un autre angle que ses confrères. Il sollicite le célèbre astrologue Cheiro afin de dresser l’horoscope de la princesse. Ce dernier n’étant pas disponible, la tâche revient à son assistant Richard Harold Naylor. Le 24 août 1930 sort l’article « Ce que les étoiles prédisent pour la nouvelle princesse et un aperçu des événements de la semaine » illustré d’une carte du ciel8.
Dans cet article, Naylor délivre ses prédictions concernant le caractère de la princesse et le début de sa vie. S’y greffent aussi des prédictions collectives à court terme.
« Le bébé est vraiment « royal », une qualité qui se manifestera de diverses manières, car elle est née sous le signe du Lion, signe « royal » par excellence du zodiaque céleste. La princesse partagera certaines caractéristiques de base communes à toutes les personnes nées ce mois-ci, ce qui fait d’elle, en quelque sorte, la cousine astrologique des lecteurs du Sunday Express dont les anniversaires se situent autour de cette même date. »
Dimension collective
La presse féminine s’empare du phénomène. En 1932, l’hebdomadaire Journal de la Femme publie une « Éphéméride la Chance »9, ancêtre des horoscopes modernes. La presse quotidienne suit rapidement le mouvement. Paris-Soir diffuse son premier horoscope quotidien le jeudi 18 avril 1935. Signé par Kerneiz, il a une dimension collective :
« Une influence neptunienne, chimérique et fantasque, dominera toute la journée, rendant encore plus agités ceux qui le sont naturellement. Les enfants seront turbulents, les femmes inquiètes et nerveuses. Tout le monde peut s’attendre à des contrariétés, contrariétés d’argent surtout, et à des nouvelles désagréables sinon franchement mauvaises. Mettez un frein à votre imagination et méfiez-vous de vos inspirations, si vous ne voulez pas vous engager dans des aventures dangereuses. Remettez à demain les décisions graves. »10
La rubrique horoscope connaît un succès croissant. À l’issue de la Seconde Guerre mondiale, l’horoscope devient une institution dans les quotidiens et hebdomadaires. La radio puis la télévision suivent le mouvement dans les années 1960.
Le règne du signe solaire
Les prédictions horoscopiques collectives s’individualisent à partir de 193911. Elles s’adressent aux lecteurs selon une classification à 12 entrées : le signe solaire, communément appelé « signe astrologique ». Des millions de personnes découvrent un nouvel aspect de leur identité. C’est une révolution culturelle.
Le signe solaire devient central dans la culture populaire et des archétypes se construisent autour de chaque signe (Bélier, Taureau, Gémeaux, Cancer, Lion, Vierge, Balance, Scorpion, Sagittaire, Capricorne, Verseau, Poissons).
Pour le grand public, l’horoscope de presse devient l’étendard de l’astrologie. Les deux deviennent interchangeables, au grand dam des défenseurs d’une astrologie individualisée, dite savante.
Lire notre page Symbolique et Interprétation.
Qui croit en l’horoscope ?
Les horoscopes de presse sont très consultés, mais ce taux élevé ne prouve pas nécessairement que le lecteur y adhère. Il peut s’agir d’une forme de « jeu social »12 ne traduisant pas le niveau de croyance réel.
Selon une série d’enquêtes menées par le Centre d’études de la vie politique française (CEVIPOF) entre 1982 et 2000, 26 % des Français déclarent « croire aux prédictions par les signes, les horoscopes »13. Un tiers de ces personnes en tiennent toujours ou souvent compte dans leur vie.
La croyance en l’astrologie touche toute la société14 15. Y sont toutefois plus sensibles :
- les employés, ouvriers et cadres par rapport aux agriculteurs ;
- les femmes par rapport aux hommes ;
- les personnes portant déjà un certain intérêt à la science, mais sans être spécialistes pour autant. Dotées d’une forme « semi-érudition »16, elles emprunteraient plus facilement des raccourcis non scientifiques.
Références
Daniel Kunth et Philippe Zarka, L’Astrologie, coll. « Que sais-je ? ». Paris, Presses Universitaires de France, 2009.
Jean-Patrice Boudet, « Chapitre I. Le renouveau de la science des astres (XIIie-XIIIe siècle) », In Entre science et nigromance. Paris : Éditions de la Sorbonne, 2006
Entrée « Horoscope », Dictionnaire de l’Académie française, édition de 1694
« L’autre partie (du thème) fait intervenir l’horizon, via le système des »maisons” (…). Elle va donc dépendre du lieu. Elle varie beaucoup plus vite, le ciel se déplaçant d’un signe en 2 heures. La distribution des huit planètes, du Soleil et de la Lune dans les 12 maisons peut donc changer jusqu’à 120 fois par jour. » Extrait de « Sur l’astrologie : réflexion de deux astronomes », adapté de la conférence « Astronomie/astrologie : le débat ! », donnée par François Biraud et Philippe Zarka le 7 avril 1997 à l’Observatoire de Meudon.
René-Guy Guérin, « Vanité de l’astrologie, ou l’horoscope serait-il une figure de Vanité ? », Littératures classiques, 2005/1, n° 56, 2005, p. 71-84.
René-Guy Guérin, L’Astrologie au XVIIe siècle. Étude sur la pratique des Horoscopes, notamment à travers ceux du Roi-Soleil (1638-1715), In École pratique des hautes études, Section des sciences religieuses. Annuaire. Tome 106, 1997-1998, 1997, pp. 577-581. La citation sur François-Henry de Bard est extraite du dossier « 10 528. Astrologie », issu des archives de la Bastille et conservé à la Bibliothèque de l’Arsenal.
René-Guy Guérin, op. cit.
« Hot off the press - New titles this week », par Rose Staveley-Wadham, publié le 7 octobre 2024, blog The British Newspaper Archive, consulté le 10 avril 2025.
Cette rubrique, plus tard renommée « Votre destin au jour le jour », est conservée jusqu’en 1940. In Edgar Morin, La croyance astrologique moderne : diagnostic sociologique, Paris : L’Âge d’homme, 1990.
« Horoscope quotidien », par Kerneiz, *Paris-Soir, *du 18 avril 1935.
Edgar Morin,* *op. cit.
Daniel Boy, « Les Français et les para-sciences : vingt ans de mesure »,* Revue française de sociologie*, 2002, 43 (1), pp. 35-45
Daniel Kunth et Philippe Zarka, op. cit.
Patrick Peretti-Watel, « Sous les étoiles, rien de nouveau ? L’horoscope dans les sociétés contemporaines », Revue française de sociologie, 2002, 43-1, pp. 3-33 ;
Daniel Kunth, « L’astrologie a-t-elle sa place dans le monde contemporain ? », Raison présente, 2018/3, n° 207, 2018, p. 99-109
Le philosophe Theodor Adorno est à l’origine de l’expression « semi-érudition » pour désigner cet état d’esprit.
Lire aussi
James Herschel Holden, A History of Horoscopic Astrology : From the Babylonian Period to the Modern Age, 2nd edition, American Federation of Astrologers, Inc., Tempe, Arizona, 2006.
Kim Farnell, The True History of Sun Sign Astrology, The Wessex Astrologer, 2022
