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Dates du Roch Hodech
Le Roch Hodech (nouvelle lune ou néoménie) est prévu aux dates suivantes :
- lundi 5 août 2024
- mardi 3 et mercredi 4 septembre 2024
- jeudi 3 octobre 2024
- vendredi 1er et samedi 2 novembre 2024
- dimanche 1er et lundi 2 décembre 2024
- mardi 31 décembre et mercredi 1er janvier 2025
Au terme d'un mois de 30 jours, ce 30èmejour et le jour suivant sont tous deux Roch Hodech. Après un mois de 29 jours, seul le lendemain est Roch Hodech.
Roch Hodech, la réjouissance du premier jour du mois devenue une fête féminine
Roch hodech, littéralement « la tête du mois », désigne en hébreu le premier jour du mois lunaire, que l’on nomme couramment en français nouvelle lune ou néoménie. A l’origine simple marqueur calendaire interprété comme une occasion de réjouissance, les nouvelles lunes ont récemment été l’objet d’un regain d’intérêt en tant que fêtes spécifiquement féminines.
A l’origine, un sacrifice destiné à marquer le début du mois
C’est dans la Torah1 que l’on trouve pour la première fois mention de rituels spécifiques à accomplir à l’occasion du 1er jour de chaque mois lunaire. Le Livre des Nombres prévoit à cette date des sacrifices d’animaux supplémentaires, accompagnés comme de coutume de farine, d’huile et de vin, lesquels s’ajoutent à ceux qui doivent être accomplis quotidiennement.
Nombres 28,11.15 : « Au commencement de vos mois, vous ferez un holocauste pour Yahvé : deux taureaux, un bélier, et sept agneaux d'un an, sans défaut […]. En plus de l'holocauste perpétuel, il sera offert à Yahvé un bouc, en sacrifice pour le péché ».
Dans la mesure où les nouvelles lunes ne sont mentionnées que dans un seul des calendriers festifs de la Torah, on considère qu’il s’agissait essentiellement à l’origine d’un rituel restreint au Temple et dont la fonction était de proclamer le début du nouveau mois puisque celui-ci n’était alors pas déterminé par des calculs astronomiques mais par l’observation du premier croissant de lune.
Dans la Bible, une occasion festive
Cependant, les diverses mentions de la néoménie dans les livres historiques et prophétiques de la Bible signalent que ce jour, fréquemment associé au sabbat2, a gagné en importance et semble avoir été l’occasion pour les fidèles de pratiques spécifiques y compris en dehors du temple de Jérusalem. Dans le Livre d’Ézéchiel, qui, au VIe siècle av. n.è., décrit le fonctionnement idéal du temple de Jérusalem, la néoménie apparait comme un jour d’affluence exceptionnelle où les sacrifices sont offerts en présence du souverain et où le peuple se rassemble dans le sanctuaire pour se prosterner.
Ézéchiel 46, 1-3 : « Ainsi parle le Seigneur Dieu : »La porte du parvis intérieur, qui est tournée vers l’orient, sera fermée durant les six jours de travail ; mais le jour du sabbat elle sera ouverte ; elle sera également ouverte au jour de la néoménie. Le prince, venant de l’extérieur, entrera par le vestibule de la porte et il se tiendra contre le montant de la porte ; puis les prêtres offriront l’holocauste3 du prince et ses sacrifices de paix4. Le prince se prosternera sur le seuil de la porte puis sortira, mais la porte ne sera pas fermée jusqu’au soir. Les laïcs se prosterneront devant le Seigneur à l’entrée de cette porte, lors des sabbats et des néoménies". »
Par ailleurs, dans le Premier livre de Samuel, le roi Saül, placé par la tradition au XIe siècle av. n.è., donne un banquet à sa cour à cette occasion :
1 Samuel 20,4-6 et 24-25 : « David dit à Jonathan : »C'est demain la nouvelle lune et je devrais m'asseoir avec le roi pour manger, mais tu me laisseras partir et je me cacherai dans la campagne jusqu'au soir". […] La nouvelle lune arriva et le roi se mit à table pour manger. Le roi s'assit à sa place habituelle, la place contre le mur, Jonathan se plaça en face, Abner s'assit à côté de Saül et la place de David resta inoccupée ».
Enfin, une allusion du Deuxième livre des Rois signale que ce jour était considéré comme une occasion de solennité religieuse, puisqu’on en profitait pour visiter les « hommes de Dieu », en l’occurrence le prophète Élisée chez lequel se rend une femme de Shounem :
2 Rois 4,22-23 : « Elle appela son mari et dit : »Envoie-moi, je t’en prie, un des serviteurs et une des ânesses ! Je cours jusque chez l’homme de Dieu et je reviens". Il dit : « Pourquoi veux-tu aller chez lui aujourd’hui ? Ce n’est ni une nouvelle lune ni un sabbat ». »
L’importance de la néoménie et son inclusion au rang des jours de fête traditionnels dans les communautés juives se vérifie dans les sources d’époque hellénistique et romaine, notamment dans les apocryphes5 juifs de la Bible ainsi que dans le Nouveau Testament. Ainsi l’amnistie proposée en 152 av. n.è., par le souverain Démétrios Ier aux révoltés judéens, dont le texte est rapporté par le Premier Livre des Maccabées, propose une exemption de taxes lors des fêtes juives y compris les néoménies6, tandis que la pieuse Judith, héroïne du Livre du même nom s’abstient de jeûner ce-jour là comme lors des autres « jours de réjouissance »7. Dans l’Épitre de Paul aux Colossiens8, les néoménies sont également associées aux autres jours de fêtes de la Bible. D’après la Mishna, une compilation rabbinique mise par écrit vers 200 de n.è., à une époque mal définie, pour informer la population qu’on nouveau mois avait commencé, on allumait des signaux lumineux sur le Mont des Oliviers, lesquels étaient retransmis dans toute la Judée, avant de s’en remettre à des messagers pour diffuser la nouvelle9. En outre, les nouvelles lunes étant des jours de réjouissance, il est interdit de jeûner et de réciter des lamentations pour les défunts10. Néanmoins, comme elles ne sont pas définies dans la Torah comme des fêtes chômées, leur statut exact est l’objet de débats entre rabbins, et elles donnaient lieu à des pratiques différenciées. Dans certaines communautés, on partageait un « repas de nouvelle lune » organisé en lien avec la synagogue, notamment lors du premier jour des mois intercalés11. Une bénédiction spécifique doit également être récitée en extérieur12. La récitation d’un ensemble de Psaumes nommé le semi-Hallel13 semble être une coutume née dans les communautés juives babyloniennes qui fût d’abord mal vue des autorités rabbiniques avant de se diffuser14.
Une forme d’observance spécifiquement féminine
Le Talmud de Jérusalem15 note qu’alors que les nouvelles lunes n’étaient pas des jours chômés, les femmes avaient coutume de s’abstenir de travailler16. Un texte rabbinique du début du Moyen Âge donne une explication à ce sujet : l’observance particulière de Roch Hodech par les femmes serait une récompense divine destinée à commémorer la piété dont celles-ci auraient fait preuve dans l’épisode biblique du Veau d’or. En effet d’après la Torah, alors que Moïse recevait les Tables de la Loi, les Hébreux rassemblés au pied du mont Sinaï, se seraient mis à forger une idole de peur d’avoir été abandonnés par le Dieu qui les avaient faits sortir d’Egypte.
Exode 32,1-4 : « Le peuple vit que Moïse tardait à descendre de la montagne ; le peuple s’assembla près d’Aaron et lui dit : "Debout ! Fais-nous des dieux qui marchent à notre tête, car ce Moïse, l’homme qui nous a fait monter du pays d’Egypte, nous ne savons pas ce qui lui est arrivé". Aaron leur dit : "Arrachez les boucles d’or qui sont aux oreilles de vos femmes, de vos fils et de vos filles, et apportez-les-moi". Tout le peuple arracha les boucles d’or qu’ils avaient aux oreilles, et on les apporta à Aaron. Ayant pris l’or de leurs mains, il le façonna au burin pour en faire une statue de veau. Ils dirent alors : « Voici tes dieux, Israël, ceux qui t’ont fait monter du pays d’Egypte ! » ».
Chapitres de Rabbi Éliézer17 45,4 : « Aaron […] fit alors le raisonnement suivant : Si je leur dis »Donnez-moi or et argent", je crains que de suite, ils me l'apportent mais voici je vais leur dire de me donner les anneaux de leurs femmes, fils et filles. Aaron leur dit alors : "Détachez les boucles d'or qui sont aux oreilles de vos femmes, de vos fils et de vos filles, et apportez-les moi". Les femmes entendirent et refusèrent de remettre leurs anneaux à leurs maris, leur disant : « Quoi ! Pour faire une idole, une abomination qui n'a aucun pouvoir salvateur ! Nous n’obéirons pas ! » Le Saint béni soit-Il a donné aux femmes leur récompense dans ce monde-ci, à savoir de célébrer les néoménies davantage que les hommes, et leur a réservé une récompense pour le monde à venir, à savoir leur renouvellement dans un temps futur ».
Ainsi, c’est la réticence des femmes à participer à la fabrication d’une idole qui aurait conduit à faire de Roch Hodech une fête particulièrement importante pour les femmes, une dimension devenue essentielle depuis les années 1970.
Des pratiques diversifiées et essentiellement féminines
Le jour de Roch Hodech, des prières festives supplémentaires sont récitées18, tandis que les lamentations usuelles sont omises. On lit à la synagogue le passage du Livre des Nombres qui détaille les sacrifices additionnels qui étaient offerts au temple de Jérusalem à cette occasion19. Néanmoins, l’essentiel des pratiques liées aux nouvelles lunes se déroule actuellement en dehors de du rite synagogal. Des sessions d’étude, des activités de danses et de chants, des repas festifs et des prières collectives sont fréquemment organisées notamment par des groupes de femmes au sein des communautés juives, qu’elles soient libérales ou orthodoxes.
Maureen Attali
Références
La Torah est l’ensemble des cinq premiers livres de la Bible – Genèse, Exode, Lévitique, Nombres, Deutéronome – réputés écrits par Moïse.
Sur l’association des néoménies avec les sabbats et les fêtes annuelles, voir Esaïe 1,13-14 et 66,23 ; Osée 2,13 ; Amos 8,5-6 ; Néhémie 10,33-34.
L’holocauste est une forme de sacrifice où l’animal est intégralement consumé.
A la différence des holocaustes, une partie de la viande issue des sacrifices de paix est consommé par les fidèles.
Les livres apocryphes sont des textes rédigés dans l’Antiquité et qui étaient considérés comme des textes sacrés par certaines communautés juives. Ils ont vraisemblablement été exclus du canon général de la Bible juive fixé à la fin du Ier siècle de notre ère, dans des circonstances mal connues.
1 Maccabées 10, 34-35.
Judith 8,6.
Colossiens 2,16.
Mishna Rosh Hashanah 2,2-4.
Mishna Taanit 2,10 et Moed Katan 3,9.
Mishna Rosh Hashanah 2,5 ; Mishna Sanhedrin 8,2 et Talmud de Jérusalem, Sanhedrin 8,2.
Talmud de Babylone, Sanhedrin 42a.
Il s’agit des Psaumes 113 à 118 amputés des 11 premiers versets du Psaume 115 ainsi que des 11 premiers versets du Psaumes 116.
Talmud de Babylone, Berakhot 14a et Taanit 28a.
Le Talmud est un recueil composé par des rabbins de l’Antiquité et dont le but et de clarifier la législation biblique. Il existe deux Talmud : le Talmud de Jérusalem (achevé vers 400) et le Talmud de Jérusalem (achevé vers 600). Chacun est composé de la Mishna associée à une série de commentaires différenciés nommés Guemarot.
Talmud de Jérusalem, Taanit 1,6 et Pesahim 4,1.
Attribué à Éliézer ben Hyrcanos, un rabbin actif à la fin du Ier siècle de n.è., ce texte est couramment daté des VIIIe-IXe siècles de n.è. Il a été traduit en français par Marc-Alain Ouaknin et Eric Smilévitch, Pirqé de Rabbi Eliézer : leçons de Rabbi Eliézer, Verdier, 1983.
Talmud de Babylone, Shabbat 24a.
Nombres 28,1–15.
Rassemblement des femmes rabins
Actuellement en Israël, Roch Hodech est le jour par excellence de rassemblement des femmes rabbins – non reconnue par les orthodoxes - au Mur des Lamentations. On trouve de très belles photos de l’office qu’elles célèbrent à cette occasion sur leur compte Flickr, rendez-vous également sur le site officiel de l'assocation Women of the Wall.